Colloque "Agir autrement pour faciliter la transition des territoires littoraux " : Restitution des échanges

Un colloque a réuni, les 25 et 26 mars 2025 à Montpellier, des acteurs territoriaux en charge de la gestion du littoral ainsi que des chercheurs issus de diverses disciplines (philosophie, sociologie, géographie, etc.) pour la présentation du guide « Agir autrement pour faciliter la transition des territoires littoraux ». L’évènement, était coorganisé par le Centre d’Économie de l’Environnement de Montpellier (CEEM) et le CNFPT, avec à la tête de l’organisation Hélène Rey-Valette, économiste au CEEM dans le cadre du programme de recherche TRAJECTOIRES. Le GIP Littoral était également partenaire de l'événement. Il a attiré près de 130 participants.
L'objectif principal du colloque était de favoriser le partage d'expériences et la mutualisation de bonnes pratiques à l'échelle nationale. Les présentations des programmes de recherche et les retours d'expérience, à travers des témoignages d'actions concrètes (PPA, projets de territoire, etc.), ont été ponctués d'ateliers thématiques, permettant aux acteurs de proposer des solutions concrètes aux problématiques identifiées. Les échanges ont été enrichis par un regard croisé, notamment entre les initiatives menées en Nouvelle-Aquitaine et en Occitanie.
Ce colloque visait à faire évoluer les outils de l’action publique pour définir des trajectoires de transition à long terme. Cela nécessite une planification flexible et progressive, anticipant les bifurcations futures. Dans un contexte de changement climatique, les incertitudes (tempêtes, crises financières) ne doivent pas conduire à un manque d’ambition politique ni à l’inaction. Les témoignages inspirants ont permis de mettre en lumière les bonnes pratiques et de dessiner les contours des possibles.
Le guide « Co-construire des trajectoires d’adaptation des territoires littoraux » a été conçu comme un outil permettant la mise en œuvre d'approches innovantes pour la transition des territoires littoraux. Illustré par des témoignages inspirants, il rassemble un recueil d'expériences tout en restant opérationnel pour les territoires, les incitant à réfléchir à leur recomposition spatiale. Pluridisciplinaire dans sa conception, il a bénéficié de la contribution de vingt auteurs venant d’horizons variés. Le guide est disponible en téléchargement ici. Une version synthétique est également consultable en cliquant ici.
Le guide définit cinq étapes essentielles pour construire des politiques d’adaptation :
• Etape 1 Créer des conditions favorables en adaptant les capacités de gouvernance et les systèmes d’information
• Etape 2 Renforcer les processus de sensibilisation et de concertation
• Etape 3 Définir un projet commun de territoire résilient à long terme
• Etape 4 S’adapter progressivement en planifiant des mesures en fonction de leur temporalité
• Etape 5 Définir des trajectoires fondées sur l’anticipation et l’apprentissage
La prise en compte du risque dans les politiques locales de Nouvelle Aquitaine
Les élus de Nouvelle-Aquitaine sont particulièrement sensibilisés, car 47 communes parmi les 93 que compte la région sont inscrites de manière volontaire sur la liste du décret. 14 SLGBC sont aujourd’hui engagées couvrant ainsi la plupart des zones exposées au recul du trait de côte. Lors du colloque, le courage politique des élus a été salué pour leurs choix audacieux en matière de gestion du trait de côte et de portage d’actions inscrites dans des projets vertueux. Des actions dites « sans regrets », incluant des opérations de relocalisation, sont déjà mises en œuvre. Ces relocalisations sont possibles dans des zones où la maîtrise foncière existe, permettant ainsi le recul de certains équipements comme des postes de secours, stations d’épuration ou parkings. Ces projets, bien que longs à réaliser, sont tangibles et nécessaires. Le constat est clair : un changement de paradigme est impératif, et les territoires se sont préparés à y faire face.
Les leviers d’actions identifiés et partagés par les acteurs territoriaux.
La loi Climat et Résilience a introduit une palette d'outils pour accompagner les territoires, mais ces outils demeurent difficiles à mobiliser dans leur état actuel et nécessitent des ajustements avec une adaptation aux spécificités des territoires (dérogations à la Loi littoral).
Leur mise en place ne pourra se faire sans un soutien financier substantiel. Le financement des actions de recomposition a d’ailleurs été abordé dès l’introduction du colloque par la députée Sophie Panonacle, qui a présenté les avancées des travaux du CNTC et les réflexions nationales sur l'accompagnement des territoires. Les élus ont souligné le besoin d’un fonds pérenne, fondé sur une solidarité nationale. Lors des questions au Gouvernement du 11 mars 2025, Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition écologique, a précisé que « la création d’un fonds pour l’érosion côtière dans le PLF2025 n’a pas pu aboutir, mais qu’il aurait vocation à être intégré en 2026, sous réserve des finances publiques et de la mobilisation de financements innovants ». Par ailleurs, la Stratégie Nationale de Gestion Intégrée du Trait de Côte devrait être adoptée d’ici l’été 2025 par décret, pour une durée de cinq ans (2025-2030).
Les politiques de trajectoire d’adaptation soulèvent des questions sur la temporalité et l’échelle des actions à mener. Projeter une vision à très long terme (+100 ans) peut paraître irréaliste, d'où l'importance d'élaborer des trajectoires d’adaptation intégrant des évolutions progressives et des points de bifurcation. Par conséquent, il a été rappelé l’importance de ne pas opposer la nécessité d’une gestion active sur du court terme pour répondre à des situations d’urgence et une recomposition devenue indispensable mais qui s’inscrit sur un temps long. Les deux doivent se compléter dans une stratégie d’adaptation cohérente.
Dans cette perspective, la recomposition spatiale des territoires nécessitera de disposer de foncier, un bien devenu rare sur le littoral. L’élaboration de stratégies foncières sera une clé de la réussite.
La recomposition spatiale ne pourra véritablement se réaliser sans une concertation citoyenne approfondie. En effet, dans un processus d'acceptation sociale, il apparaît essentiel de placer l'habitant au cœur des projets de transformation. Ainsi, instaurer une véritable démocratie participative devient une démarche indispensable.
Une difficulté partagée concerne l’acquisition de biens privés, notamment ceux situés en première ligne et menacés à court terme. Des questions sur la décote des biens et les risques juridiques pour les collectivités en cas d’expropriation se posent encore. La valeur des biens menacés à court terme est une question sensible.
Ce colloque a donc été une occasion précieuse de croiser les perspectives, de renforcer la coopération interterritoriale et de réfléchir collectivement aux stratégies d’adaptation des territoires littoraux.